Culture, Histoire et Patrimoine de Passy

L’explosion du 16 février 1915 à Chedde

Written By: BT

… et les autres accidents pendant la Grande Guerre

Lire notre revue Vatusium n° 18, 2015 « Les Passerands dans la Grande Guerre », 1ère partie : 1914 et 1915.

Cette page BONUS complète notre article « Surveillance, paranoïa, réalité à l’usine de Chedde » publié dans Vatusium n ° 18, pages 46 à 48.

Une plaque commémorative de l’explosion du 16 février 1915 a été dévoilée par M. le maire de Passy à l’entrée de l’usine de Chedde le VENDREDI 16 DECEMBRE 2016. 

Voir notre page Inauguration à Passy de la plaque commémorative « Hommage aux tués de l’atelier de cheddite pendant la Grande Guerre », 16 déc. 2016 .

CHePP a payé la moitié de la plaque ; la mairie de Passy et l’usine ont pris en charge l’autre moitié.

Lire en introduction notre page sur « La production de la cheddite à Passy en 14-18 »

L’Usine de Chedde : la sortie (Pierre Dupraz, Traditions et évolution de Passy, p. 107)

L’Usine de Chedde : la sortie (Pierre Dupraz, Traditions et évolution de Passy, p. 107)

La presse française du 18 février 1915 se fait l’écho d’un terrible accident à Passy :

Paris, 17 février. « Hier soir, à l’usine de Chedde, une explosion accidentelle s’est produite au cours d’expériences de malaxage qui étaient exécutées sous la direction de l’ingénieur du service de l’Etat, assisté de l’ingénieur de l’établissement. Le bâtiment où s’effectuaient les essais a été endommagé assez sérieusement. La fabrication continue. L’accident a fait malheureusement plusieurs victimes. » (agence Havas, source BNF)
Ce communiqué de l’agence Havas, très succinct, a également été publié dans le journal La Presse du 18 février 1915 sous le titre  « A l’usine de Chedde ». (L’Express du Midi, jeudi 18 février 1915, page 2, 3ème colonne : Explosion dans une poudrière ; Source Bibliothèque municipale de Toulouse)

Que s’était-il passé ? Pour le comprendre, il faut remonter à la naissance de la « cheddite ».

Raoul Dautriche cherche à augmenter la fabrication de la cheddite

« La fabrication de l’explosif consistait à enrober le perchlorate dans de la paraffine fondue vers 35/40° (…) ; on ajoutait peu à peu le perchlorate à la paraffine fondue en malaxant le tout avec une grande palette de bois ; une opération ne portait que sur vingt à trente kilos au maximum. C’était évidemment très artisanal, et en prévision des grosses productions attendues, le Service des Poudres recherchait des moyens plus industriels ; c’est à quoi s’occupait l’Ingénieur Principal des Poudres, Raoul Dautriche (Voir sa photo dans Vatusium n° 18, p. 48). » (Paul Soudan, op. cit.)
Détaché au début de 1915 pour cette mission, il commandait avec le rang de lieutenant-colonel la poudrerie militaire de Chedde.

Affiche de 1905 « la CHEDDITE » (Doc. Mémoire de Chedde)

Affiche de 1905 « la CHEDDITE » (Doc. Mémoire de Chedde)

Une expérience risquée, qui tourne au drame le 16 février 1915

Raoul Dautriche avait choisi pour effectuer le malaxage, « un des malaxeurs mécaniques à double vis hélicoïdale, chauffés à la vapeur qui servaient à préparer la pâte, mélange de brai fondu et de poudre de coke, base des électrodes pour les fours à aluminium. Cet appareil était du point de vue mécanique parfaitement adapté pour cet usage, mais Paul Corbin qui connaissait bien ses explosifs, signala le danger de frottements non contrôlés et laissa la responsabilité des essais au Service des Poudres. » (Paul SOUDAN, Historique de l’usine de Chedde)
« De toute évidence ce malaxeur était une bombe. » (Revue Mémoire de Chedde n° 20, 2005, Les accidents dus à la cheddite, page 11)
« Les chlorates étaient fabriqués dans une série de cuves à électrolyse, alimentées en saumure par un réseau de canalisation. » (Pierre Dupraz)

Les cuves à électrolyse de l’usine de Chedde (Pierre Dupraz, Traditions et évolution de Passy, p. 108 ; doc. Mémoire de l’Usine de Chedde)

Les cuves à électrolyse de l’usine de Chedde (Pierre Dupraz, Traditions et évolution de Passy, p. 108 ; doc. Mémoire de l’Usine de Chedde)

« Les premiers essais avaient été satisfaisants, mais le 16 février 1915, au cours d’un nouvel essai de démonstration » avec 250 kg de poudre « le malaxeur explosa, dispersant sur plusieurs centaines de mètres les restes des sept malheureux acteurs ou spectateurs. » (Paul SOUDAN, op. cit.)
L’histoire raconte que l’on retrouva les restes d’un homme sur le pont du chemin de fer des Gures.

Cette explosion fait 7 victimes* et une quinzaine de blessés dont un conduit à l’hôpital de Sallanches (Voir la liste des victimes dans notre revue Vatusium n° 18, p. 48)

Un nouvel accident mortel le 8 juin 1915

« Le finissage du perchlorate d’ammoniaque – séchage et broyage – est une opération délicate étant donné l’instabilité de ce produit qui déflagre spontanément vers 250°. En juin 1915, la déflagration de la charge d’un broyeur occasionna un mort asphyxié par les vapeurs nitreuses dégagées ; peu après un incendie se déclara au séchage. » (Paul SOUDAN, op. cit.)

Cet ouvrier de 39 ans s’appelait Alexandre Ferdinand Favret ; manœuvre, célibataire, fils de Marie Eugénie Favret, il demeurait et était né à Passy le 11 avril 1876 (Archives municipales de Passy, Actes de décès de l’année 1915).

Un autre accident mortel le 20 mars 1917

« Le 20 mars 1917 un ouvrier perdit la vie entraîné par la courroie de transmission d’un élévateur à perchlorate. » (Ludovic CAILLUET, Chedde. Un siècle d’industrie au pays du Mont-Blanc)
Cet ouvrier de 50 ans s’appelait Jean Joseph Jacquier ; né à Salvan, dans le canton du Valais (Suisse) le 10 septembre 1867, ce manœuvre, fils de Jean Jacquier, cultivateur et de Marie Anne Bochatey son épouse, ménagère, domiciliés à Salvan (Suisse), était marié à Victorine Lugon-Moulin (Archives municipales de Passy, Actes de décès de l’année 1917).

« Il fallut multiplier les précautions et il n’y eut plus d’accident notable durant la guerre. » (Paul SOUDAN, op. cit.)

Références :
– Paul SOUDAN, Historique de l’usine de Chedde, 1975, p. 45-46, chap. II – 2, « Evolution de la société et de la fabrication des chlorates de 1898 à 1914 » ; p. 83-84, chap. II – 6, Les années de guerre 1914-1918.
– Ludovic CAILLUET, Chedde. Un siècle d’industrie au pays du Mont-Blanc, Presses Universitaires de Grenoble, collection Histoire industrielle, 1997, p. 38-40.

Compléter cette page avec celles de notre chapitre sur le patrimoine industriel de Passy.

Voir nos autres pages sur
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en particulier
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