Le dimanche 12 avril 2015, jour du 70e anniversaire de la libération des camps de Buchenwald-Dora, Pierre DUPRAZ, président de notre association « Culture, Histoire et Patrimoine de Passy » a souhaité rendre hommage à René Guillermin, résident du Passy-Flore ; il a, à cet effet, invité Patrick Kollibay, maire de Passy, et Jean-Marc Peillex, Conseiller départemental maire de St-Gervais, à rencontrer ce témoin des heures tragiques de la Seconde Guerre mondiale.
Voici les mots qu’il a prononcés dans le studio où Monsieur Guillermin a accueilli les élus :
René Guillermin. La rafle du 14 décembre 1943 à Nantua
“Merci à nos élus Patrick Kollibay, maire de Passy et Jean-Marc Peillex Conseiller départemental maire de St-Gervais de nous avoir rejoint, merci aussi à Véronique Tilloy directrice de cette maison Passy Flore pour son accueil en ce 12 avril 2015, 70e anniversaire de la libération des camps de Buchenwald-Dora.”
“Le 6 décembre 1943, quelques semaines après le défilé du 11 novembre 1943 à Oyonnax, des maquisards organisent une expédition punitive contre un couple d’hôteliers de Nantua… Déshabillés, ils sont couverts de croix gammées peintes avant d’être amenés et abandonnés dans la rue principale d’Oyonnax. En réponse à cet « outrage », les Allemands organisent une rafle. Le 14 décembre à l’aube, toute la ville de Nantua est cernée par 500 militaires allemands appartenant aux forces de police et à la SS. La ville est bouclée. Tous les hommes valides sont arrêtés et regroupés. Au collège Xavier Bichat, au moment de la récréation de 10 h, l’établissement est fouillé, pendant que tous les élèves et le personnel sont alignés contre un mur dans la cour. 21 d’entre eux sont arrêtés et regroupés à la gare avec tous les autres raflés. Parmi eux, René Guillermin, élève et surveillant.
Les maisons sont fouillées. Le docteur Emile Mercier, résistant, est dénoncé, fusillé.
Environ 130 hommes âgés de 18 à 40 ans sont acheminés en train vers Bourg-en-Bresse, puis à Compiègne où ils rejoignent le camp de transit réservé aux prisonniers politiques. Quelques-uns parviennent à s’échapper. 116 personnes sont déportées au camp de Buchenwald, 95 ne sont jamais revenues.
Au camp, c’est l’attente et les corvées.
Une partie des hommes est intégrée à une unité souterraine, le commando « Tunnel » où l’on assemble les fameuses fusées V2. René Guillermin est de ceux qui y sont affectés. Le travail est pénible et bientôt l’unité est cantonnée dans le tunnel même. Les factions sont longues de 12 H ; les hommes ne savent plus si on est le jour ou la nuit. Ils ne voient plus le soleil pendant de longs mois.
A l’approche des libérateurs alliés, les Allemands décident de déplacer les prisonniers vers d’autres camps, en train ou à pied. Ceux qui montrent des signes de faiblesse sont exécutés sur le champ.
Fin février 1945, derrière les barbelés du camp principal et dans les 88 camps externes, se trouvent 112 000 personnes, parmi lesquelles 25 000 femmes. Les conditions de vie dans le camp principal se sont fortement dégradées, provoquant quelque 13 000 morts. Du 7 au 10 avril, 28 000 personnes du camp sont à leur tour évacuées vers les camps de Dachau, de Flossenbürg et de Theresienstadt.
Le 11 avril 1945, ceux qui survivent verront arriver les soldats américains de la 6e division blindée de la 3e armée américaine dans le camp de Buchenwald, provoquant la fuite des SS. Dans ces circonstances, en milieu de journée, le comité international clandestin déclenche une insurrection ; des groupes de résistance prennent le contrôle du camp : 21 000 détenus retrouvent ainsi la liberté. Nous sommes le 12 avril 1945…
Sorti de ce cauchemar, René Guillermin s’installera à Saint-Gervais, où ses connaissances en électronique lui permettront d’être un technicien très apprécié de Radiotélévision. Il sera un membre actif de la section locale de la Fédération Nationale des Déportés, Internés Résistants Patriotes (FNDIRP). Le devoir de mémoire lui est chevillé au corps, afin que les atrocités que ses compagnons et lui-même ont subies ne soient pas oubliées et servent de témoignage à la jeunesse actuelle.
Depuis 12 ans, M. Guillermin occupe un studio au Foyer logement « Le Passy-Flore », il navigue sur internet et dans ses souvenirs, avec lucidité. Une liberté bien précieuse lui a été rendue.
Nous avons voulu saluer cet homme remarquable et déterminé en ce 70e anniversaire de la libération des camps de Buchenwald-Dora où il fut détenu.”
Pierre DUPRAZ, président de l’association « Culture, Histoire et Patrimoine de Passy ».
Pierre Dupraz a ensuite offert à René Guillermin un livre de Michel Germain, La Haute-Savoie 1939-1945. Entre Ombre et Lumière, que les élus et lui-même ont dédicacé.
La rencontre s’est terminée autour d’une coupe de champagne ; mais celle de René Guillermin ne contenait que de… l’eau.
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La libération de Passy