Lire notre revue Vatusium n° 16, p. 34 à 37 : Journal scolaire de Passy « Face au Mont-Blanc ».
« … La mobilisation des armées de terre, de mer et de l’air est ordonnée, ainsi que la réquisition des animaux, voitures, moyens d’attelage, aéronefs, véhicules automobiles, navires embarcations, engins de manutention et de tous les moyens nécessaires pour suppléer à l’insuffisance des moyens ordinaires d’approvisionnement de ces armées. »
Les enfants de l’école du Chef-lieu à Passy ont bénéficié de la pédagogie Freinet ; celle-ci était mise en œuvre par l’instituteur Monsieur F. Dunand et plusieurs fascicules des années 1932 à 52 ont été retrouvés… et sauvés de la benne.
Au lieu d’imposer une « rédaction », les maîtres qui suivent la pédagogie de Célestin Freinet incitent leurs élèves à choisir un sujet librement. Ce texte libre permet aux enfants de « se dire », les textes retravaillés ou non par l’auteur ou la classe (puis validés par celle-ci) sont socialisés par le biais du journal.
« L’enfant qui s’exprime librement raconte d’abord le milieu dans lequel il vit, ce qu’il a envie de dire à ses camarades, à son maître et décrit la réalité du monde qui vibre autour de lui. » Célestin Freinet, Le texte libre. (Site ICEM )
En 1939, à la mobilisation *, les bêtes ont été réquisitionnées pour l’armée ; les mulets, ânes, chevaux… étaient amenés devant un « conseil de révision » qui décidait de leur sort. Celui-ci a eu lieu le mardi 16 mai 1939, devant l’école de Passy…
* Note CHePP : La première mise en alerte des forces françaises a lieu de mars à avril 1936, suite à la remilitarisation de la Rhénanie par le gouvernement allemand. La deuxième alerte se déroule de mars à mai 1938, à cause de l’Anschluss, annexion de l’Autriche par l’Allemagne. La crise des Sudètes entraine une nouvelle mise en alerte en septembre 1938, suivie d’une mobilisation partielle à partir du 23 septembre 1938 jusqu’au 6 octobre de la même année.
Le 1er septembre 1939, suite à l’attaque allemande contre la Pologne, la mobilisation générale française est décidée, applicable à partir du 2 à minuit ; Le 3 septembre à 17 h, la France déclare la guerre à l’Allemagne. Pour cette mobilisation générale, en quelques jours eurent lieu les réquisitions de chevaux, de voitures automobiles, de camions et même de tracteurs.
Voici deux pages du journal scolaire d’avril-mai 1939 qui sont des « notations sur l’ardoise » : L’école est située devant la place de l’église et de la mairie, point d’observation idéal. Cette prise de notes a été reproduite dans le journal scolaire telle quelle, sans mise en forme ni rédaction.
« D’une fenêtre de la classe » Mardi 16 mai 1939
“Ce matin, c’est la révision des chevaux. Le maître me poste près de la fenêtre et me dit de décrire tout ce que je verrai. Voici les notations faites sur l’ardoise.
Des chevaux arrivent attelés à des tombereaux. Les hommes les font ranger sur la place. Un homme traverse la place avec sa mule qu’il tient par la bride. Un autre descend de chez lui à cheval.
L’homme qui fait la révision est habillé en kaki : c’est un soldat.
Deux chevaux, une jument et un cheval vont s’aligner à côté des platanes. Ils sont menés par la bride. Cinq hommes arrivent avec leurs chevaux sellés. Un homme débouche d’en haut avec son mulet noir. Un jeune homme amène une jument rousse à la crinière blonde. Des autres arrivent avec leurs chevaux couverts de bâches. Un autre cheval est attelé à un cabriolet. Un grand nombre de chevaux sont déjà réunis sur la place ; ils sont presque tous recouverts d’une bâche. Une grosse jument grise suivi d’un mulet vient se ranger sur la place.
Trois mules noires et quatre chevaux vont augmenter le nombre de chevaux. Un grand encombrement règne maintenant sur la place ; une jument attachée par la bride à un cabriolet hennit. Des chevaux sont attachés à la balustrade. Un mulet ronge les rosiers. Le maître s’en aperçoit et se fâche.
Maintenant les gens commencent à s’en retourner chez eux.” Gavard Jean, 12 ans 4 mois.
Quelques souvenirs d’une habitante de St-Cézaire sur Siagne, à l’ouest de Grasse (06530) permettent de comprendre la scène :
« Papillon, le cheval de Mireille, a eu la chance d’être réformé par un membre du « conseil » qui l’avait vu naître et la joie de Mireille de le voir revenir était encore visible 65 ans après ! Le cheval du père de Marcelle a été accepté et elle regrette encore que son père n’ait pas suivi ses conseils qui auraient pu le faire réformer. Elle se souvenait en effet que lors de la première guerre mondiale, Bijou, le cheval de son grand-père, n’avait pas été accepté car il était épuisé devant le conseil, ayant trotté pendant toute une matinée avant d’être emmené à St-Vallier, certains mettaient même un clou dans le sabot pour que leur bête soit refusée ! » (La période 1939-1945 … – Journal n° 26 )
Autres pages sur
Le Chasseur Français N°600 Juin 1940 Page 361 : Les chevaux de « réquisition » et de « réforme »
– La méthode Freinet à Passy et le journal de classe « face au Mont-Blanc »– L’atelier d’imprimerie Freinet
– L’imprimerie Freinet à l’école de Passy
– les écoles primaires de Passy
A découvrir également…
– L’enseignement à Passy.
– Le PATRIMOINE CIVIL de PASSY.
– Le PATRIMOINE de PASSY.
– HISTOIRE DES VILLAGES DE PASSY DU XVIe A NOS JOURS.
– HISTOIRE de PASSY DE LA PREHISTOIRE AU XXIe SIECLE.
– le PATRIMOINE RELIGIEUX de PASSY.
Nous contacter ; Commander nos publications
Lettre d’information-Newsletter