Culture, Histoire et Patrimoine de Passy

Les chiens d’Alaska dans les Vosges pendant la Grande Guerre

Written By: BT

Lire notre revue Vatusium n° 18, 2015 « Les Passerands dans la Grande Guerre », 1ère partie : 1914 et 1915.

Cette page BONUS complète notre article « Alsace et Lorraine en 1915 » publié dans Vatusium n ° 18, pages 42-43.

Le recours aux chiens de traineaux dans les Vosges pendant la Grande Guerre
(Texte composé à partir des sites suivants : chiensdetraineau.free.fr, arte.tv/fr, nordic.traineau.free.fr, l-histoire-d-hier-a-demain.eklablog.com, poilusdalaska.com)

Des chasseurs de Passy, par exemple ceux des 11e, 14e, 32e, 62e, 67e BCA ont bénéficié dans les Vosges de l’aide de chiens venus d’Alaska.

Janvier 1917 deux chiens d’Alaska de la 2ème SECA – Crédits Pascal DURAND

Janvier 1917 deux chiens d’Alaska de la 2ème SECA – Crédits Pascal DURAND (site legrandshivarit)

Janvier 1917 deux chiens d’Alaska de la 2ème SECA – Crédits Pascal DURAND (site legrandshivarit)

Rigueur de l’hiver dans les Hautes-Vosges

« Hiver 1914-1915, l’un des plus rigoureux de ce début de siècle. Sur les crêtes vosgiennes la neige atteint parfois 2 mètres de haut et l’accumulation des neiges rend long et difficile le travail des mulets. Les soldats doivent continuellement déneiger pour leur dégager le passage. Leur ouvrage s’avère rapidement inefficace. » (Site chiensdetraineau.free.fr)

« La situation des soldats qui, en première ligne, défendent la très stratégique « ligne bleue des Vosges » est catastrophique : coupés de leur base arrière par d’importantes chutes de neige, il est impossible de les ravitailler en nourriture et en munitions.
Le front résiste mais des milliers de chasseurs alpins y laissent la vie. Il faut absolument éviter que le désastre ne se reproduise l’hiver suivant, au risque, cette fois, de l’invasion totale du territoire français par les Allemands !

Une solution venue du Canada

Le capitaine Louis Moufflet (site ufacbagnolet)

(site ufacbagnolet)

Deux officiers proposent alors au commandement de l’Armée des Vosges d’utiliser des chiens de traîneau. Pour avoir vécu en Alaska avant le conflit, le capitaine Louis Moufflet du 62ème bataillon de Chasseurs Alpins (bataillon de réserve formé à partir du 22ème bataillon), grièvement blessé au début de la guerre, et le lieutenant d’infanterie René Haas, lequel, avant la guerre, était prospecteur d’or en Alaska. » (voir leurs portraits sur le site poilusdalaska.com) http://www.poilusdalaska.com/personnages.htm .

« Les deux hommes connaissent bien les difficultés de vie et de transport dans les régions extrêmement froides puisque avant la guerre, ils vivaient en Alaska. Ils suggèrent alors d’utiliser des traîneaux à chiens pour l’acheminement des fournitures. Ils connaissent l’incroyable résistance de ces animaux capables de sillonner le grand nord sur des milliers de kilomètres.  Il existe en France des chiens de « trait » ou de « bât », mais l’activité de traîneau est alors pratiquement inconnue. »

Les arguments de deux anciens chercheurs d’or sont incontestables.

« À l’inverse des ânes, sur n’importe quelles neiges des Vosges, même nouvellement tombée en grande abondance, un attelage de chiens circulerait aisément.
Le chien présente de plus d’autres avantages sur le mulet : il est pratiquement insensible et résistant au froid. On le loge dans le moindre abri ; il se nourrit facilement.

(site ufacbagnolet)

(site ufacbagnolet)

Qui plus est, ces chiens-là sont dociles, n’aboient pas et ne préoccupent pas des coups de fusil tirés à côté d’eux. Attelés à des traîneaux, ou quand il n’y a pas de neige, à des voitures légères, 10 chiens peuvent traîner 250 kilos environ de charge utile.
À l’inverse, en haute montagne neigeuse, un mulet transporte lentement et avec beaucoup de difficultés une charge utile de 80 kilos. Alors qu’un attelage de 10 chiens, se déplacerait plus vite et à moindre fatigue sur une distance de 50 ou 60 kilomètres. Le mulet ne peut faire avec peine qu’une trentaine de kilomètres. Un attelage équivaudrait donc à 6 bons mulets. »

« Dans un premier temps, l’état-major sourit devant une telle proposition. Tout à son prestige et ses traditions, il juge la solution « Haas & Moufflet » d’autant plus irrespectueuse qu’elle suggère que la Cavalerie, division d’élite de l’armée française et dont l’échec est avéré dans les Vosges, serait inférieure à un bataillon de chiens !
Patients et déterminés, les deux officiers sont venus avec des documents et des photos. Ils racontent leurs propres expériences de déplacements, là-bas à la frontière de l’Arctique. L’expérience des Esquimaux, celle des chercheurs d’or du Klondike et bien sûr, des attelages postiers qui sillonnent le grand nord, sur plus de 1300 kilomètres dans la tourmente, et que rien n’arrête. Rien, pas même le blizzard. » (Site chiensdetraineau)

Un attelage de chiens esquimaux

Un attelage de chiens esquimaux (Site l-histoire-d-hier-a-demain.eklablog.com)

Un attelage de chiens esquimaux (Site l-histoire-d-hier-a-demain.eklablog.com)

Septembre 1915 : Une mission entourée du plus grand secret
Le général de Maud’huy, qui commande la VIIème Armée des Vosges et d’Alsace depuis le mois d’avril 1915, approuve l’envoi dans les Vosges d’un équipage comprenant 400 chiens d’Alaska et une quarantaine de traîneaux.
Le 5 août 1915 : le ministère de la guerre est informé officiellement. Le 7 août : Mr Millerand, Ministre de la guerre approuve le projet.

Ils partent donc pour l’Amérique du Nord avec pour mission d’acheter plus de quatre cents chiens, des traîneaux et des harnachements, ainsi que des provisions de nourriture spécifique. 10 000 kilomètres à parcourir sous la menace ennemie avec une meute de bêtes sauvages !

mush-scotty

(site arte.tv)

Avant même la réception de l’ordre, René Haas avait fait câbler un message à Nome, au bord de la mer de Béring par le relais TSF de la Tour Eiffel. Il télégraphie au plus célèbre des conducteurs de traîneaux à chiens d’Alaska, le musher Scotty Allan, celui-là même qui inspira Jack London dans L’Appel de la forêt, publié en 1903, pour lui demander son soutien, son expertise et son aide. (voir son portrait sur le site poilusdalaska.com) . Haas lui demande son soutien afin de réunir 106 chiens de tête, ainsi que des traîneaux, les harnais et plusieurs tonnes de saumon séché.

L’homme qui murmurait à l’oreille des chiens
Scotty Allan est un musher de légende. Écossais émigré en Amérique, il part en Alaska pendant la ruée vers l’or. C’est là qu’il fait la connaissance de l’écrivain Jack London. Ce n’est que vers les années 1900-1910 qu’il devient célèbre dans tous les États-Unis en gagnant la plus grande course de chiens de traîneaux de l’époque « l’Alaska Sweepstake Race », 408 miles à parcourir.

Déconvenues américaines…

« A New-York, puis à Boston, Moufflet doit faire face à plusieurs déconvenues : il obtient un financement bien inférieur à ce qui était prévu et doit essuyer le refus de toutes les compagnies américaines d’assurer le transport militaire français au nom de la neutralité prônée par le Président Wilson (les Etats-Unis n’entreront en guerre qu’en avril 1917).

Il décide donc de partir de la ville de Québec, en territoire allié, afin de trouver les autres chiens qui constitueront les attelages. »

Pendant ce temps, « à des milliers de kilomètres à l’ouest de Montréal, avant l’arrivée de Haas, Scotty a déjà commencé la tournée des villages esquimaux dans la plus grande discrétion, laissant juste croire qu’il recherche de nouveaux chiens pour son chenil. Si les Inuits avaient su que Scotty achetait pour le compte du gouvernement français, les prix auraient immédiatement flambé. Lorsque le lieutenant Haas arrive à Nome, les chiens sont prêts avec traîneaux, harnais et 2 tonnes de saumon séché … »

Une expédition dangereuse et rocambolesque

La première étape dure neuf jours jusqu’à Seattle, sans incident. L’aventure doit maintenant les emmener par le train jusqu’à Québec : un périple de 5 000 kilomètres. Ils traversent tout le Canada dans un train spécial, déjouent plusieurs tentatives d’empoisonnement et d’assassinat organisées par les espions allemands »

De Nome à Québec en passant par Seattle

De Nome à Québec en passant par Seattle (site pierreswesternfront.punt.nl)

De Nome à Québec en passant par Seattle (site pierreswesternfront.punt.nl)

« Le 27 octobre 1915, au terme d’un périple de plus de cinq mille kilomètres, Haas, Scotty Allan et la totalité des chiens arrivent sains et saufs à Québec.
A Québec, Scotty Allan et le Lieutenant Haas retrouvent le Capitaine Moufflet. Avant leur arrivée, le capitaine est parvenu à réunir en quelques semaines quelque 350 chiens de la Belle province et du Labrador, a fait fabriquer des harnais et des traîneaux. Il a parcouru des centaines de kilomètres dans la forêt boréale à cheval ou en canoë pour acheter les chiens auprès des Indiens et des trappeurs. Lui aussi a dû lutter contre les espions allemands, mais également contre les profiteurs de tout genre qui s’engraissent à bon compte sur la guerre.

En moins de deux semaines 436 chiens ont ainsi été réunis : les harnais confectionnés, les soixante-dix traîneaux construits ainsi que les cinq tonnes de biscuits spéciaux préparés. À eux trois, ils constituent la plus grande meute de chiens jamais réunie au monde. »

Pour découvrir tous les détails de cette épopée, véritable thriller, lire le passionnant récit publié sur le site chiensdetraineau.free et le site poilusdalaska.com

Le Poméranien, de la Allan Steamship Line Company 

Le Poméranien, de la Allan Steamship Line Company (site chiensdetraineau.free)

Le Poméranien, de la Allan Steamship Line Company (site chiensdetraineau.free)

« Ils embarquent à Québec sur un vieux rafiot sauvé de la démolition, affrontent pendant quinze jours les tempêtes et les sous-marins ennemis et accostent enfin au Havre le 5 décembre 1915 ! »

Sandy Mac Donald, le commandant du Poméranien, est bien décidé à installer les chiens dans l’entrepont à cause de leurs hurlements. Scotty Allan ne peut l’accepter : les chiens n’y survivront pas. Il va prouver au commandant qu’il est capable de les faire taire.
« Les chiens, parqués dans un hangar, sont dans un état de surexcitation. Pourtant, lorsque Scotty Allan prononce quelques mots, les têtes de meute sont ramenées au silence. Peu à peu, tous les chiens vont ainsi cesser de hurler et l’incrédule commandant racontera que Scotty Allan parle aux chiens.
Une fois dans la zone de guerre, chaque nuit, Scotty est sur le pont avec la meute. Il réussit le miracle d’imposer le silence pendant toute la traversée. »

Recrutement et formation de soldats volontaires

« Ces chiens devaient donc servir au ravitaillement des troupes en ligne dans les montagnes des Vosges et d’Alsace. Pour constituer les effectifs des équipages canins, des volontaires furent demandés au début d’avril 1916 dans les différentes formations du Train des Equipages employés sur le front d’Alsace.
Tous ces volontaires, gradés et hommes de troupe, furent rassemblés et un détachement important fut dirigé sur Le Havre pour y prendre livraison des animaux et du matériel qui venait d’être débarqué. »

Attelages de chiens

Attelages de chiens (site ufacbagnolet)

Attelages de chiens (site ufacbagnolet)

« Entre 60 et 80 soldats, chasseurs alpins ou soldats issus du Train des équipages, sont donc dirigés sur Le Havre pour y prendre livraison des animaux et du matériel qui venait d’être débarqué et pour suivre les entraînements avec leurs attelages et former les premières Sections d’équipage de chiens d’Alaska, les fameuses SECA.
Lorsque les soldats se trouvent pour la première fois en face des chiens, ils se mettent à rire ! Ces toutes petites bestioles qu’on leur envoie de l’autre bout de la terre pour faire ce que les chevaux, les mulets et les hommes ont été incapables de réussir ? Tout simplement impossible !

Mais ces soldats, qui n’ont jamais vu de chiens esquimaux, suivent attentivement les conseils prodigués par Scotty Allan. Il leur apprend à se faire respecter par ces chiens à demi sauvages, à les placer correctement dans l’attelage selon leur rôle respectif : chien de tête, pointeur droit et gauche… Soixante équipages composés chacun d’un traîneau de sept à neuf chiens et une vingtaine de chiens en réserve sont opérationnels et partent pour les premières lignes dans les Vosges, sous les yeux de Scotty Allan qui n’est pas autorisé à les suivre. »

Chasseurs alpins et leurs chiens 

Chasseurs alpins et leurs chiens (site atoute.org)

Chasseurs alpins et leurs chiens (site atoute.org)

Les équipages de chiens d’Alaska sur le front français de 14-18

Le 15 décembre 1915 : L’ensemble des hommes et des chiens arrive dans les Vosges (voir notre page).

Equipage canin des chiens de l’Alaska. Un traineau attelé 

Equipage canin des chiens de l’Alaska. Un traineau attelé (site chiensdetraineau.free)

Equipage canin des chiens de l’Alaska. Un traineau attelé (site chiensdetraineau.free)

Répartition des attelages sur le front

Ces éléments furent dirigés ensuite sur le Syndicat Saint-Amé, près de Gérardmer, où l’équipage fut organisé en deux sections :
– la première, sous le commandement du Lieutenant Haas est installée au Tanet ;
– la deuxième, sous le commandement du Lieutenant Hérodier est installée au col du Breitfirst.

Une fois les éléments arrivés dans les Vosges, à quelques kilomètres des combats, Scotty Allan est agréablement surpris lorsqu’il rencontre les Chasseurs. Il avoue alors avoir eu un a priori, une image peu flatteuse des Français d’Alaska. Mais ces hommes sont calmes et attentifs, tous ont vécu l’enfer du front et comprennent l’importance de leur mission. Certains d’entre eux, comme le Père Bernard, missionnaire du Canada et de l’Alaska, fin connaisseur de ce moyen de transport, pour l’avoir abondamment pratiqué en temps de paix,
retrouvent leurs chiens qu’ils avaient laissés derrière eux à Nome auprès de Scotty. Pendant toute l’instruction, le lieutenant Haas servira d’interprète.

Le lieutenant Haas, chargé d’instruire les conducteurs français  

Le lieutenant Haas, consul de France en Alaska, chargé d’instruire les conducteurs français (site chiensdetraineau.free)

Le lieutenant Haas, consul de France en Alaska, chargé d’instruire les conducteurs français (site chiensdetraineau.free)

Les principaux points de ravitaillement furent pour la 1ère Section : le Calvaire, le Lac Blanc, le Lac Noir, la Roche des Fées, le Rossberg, le Linge (voir notre page), etc.
Pour la 2ème Section : le Hartmannswillerkopf (voir notre page), le Côte 1025, Mittlach, le Linge, le Lac Blanc, le lac Noir, Metzeral (voir notre page), le Hohneck, etc.
Pendant la période d’été, les traîneaux étaient munis de roues caoutchoutées et le ravitaillement continuait dans des conditions analogues.

Ils ont rempli ces missions de ravitaillement sur la route des Crêtes, la Tête des faux au Makstein à l’extrême sud de la vallée de la Fecht.

Chasseurs alpins et attelages de chiens 

Chasseurs alpins et attelages de chiens (site chiensdetraineau.free)

Chasseurs alpins et attelages de chiens (site chiensdetraineau.free)

Rapides, maniables et silencieux, les équipages permettent de tenir ou de reprendre tous les sommets des Vosges durant la Première Guerre mondiale. » (site poilusdalaska.com)

« Le traîneau était conduit par un homme de troupe ou un gradé qui se tenait debout à l’arrière, sur les patins du frein. Un frein au pied permettait d’engager dans la neige, des pointes d’acier. La manœuvre ne tardant pas à avertir les chiens qu’il y avait là, pour eux, matière à arrêter leur progression.
Sur le traîneau se tenait un deuxième conducteur chargé de surveiller le chargement et qui, le cas échéant, prêtait main forte au conducteur, afin d’équilibrer ou de diriger l’équipage. » (site artois)

Un attelage sur la route des crêtes 

Un attelage sur la route des crêtes (site pierreswesternfront.punt.nl, article route des crêtes)

Un attelage sur la route des crêtes (site pierreswesternfront.punt.nl, article route des crêtes)

Un attelage bien constitué pouvait remplacer six mulets.

Pendant la période des grands froids, lorsque toutes les communications étaient interrompues, quand les fantassins étaient bloqués par la neige dans leurs tranchées, les artilleurs dans leurs abris de batteries, les équipages canins, sur leurs traîneaux, apportaient à leurs camarades les denrées indispensables : des vivres, du charbon de bois, des vêtements chauds et des munitions. Ils assuraient également le transport des officiers généraux et d’Etat-Major qui n’avaient pas d’autre moyen pour se rendre dans les lignes.
En hiver, les chiens redoublent d’ardeur au travail. De novembre 1916 à mai 1917, les chiens ne connaissent aucun répit.

Chasseurs alpins et leurs attelages de chiens de traineau 

Chasseurs alpins et leurs attelages de chiens de traineau (site resistanceinventerre)

Chasseurs alpins et leurs attelages de chiens de traineau (site resistanceinventerre)

Chaque équipe peut porter ainsi de trois à quatre cents kilos à chaque voyage, à une vitesse moyenne de 8 kilomètres à l’heure. Elle peut faire environ 40 kilomètres par jour et, en cas de besoin, jusqu’à 70 kilomètres. Autant que faire se peut, on aménage les pistes pour le passage des traîneaux, mais les attelages se contentent d’un rien et se révèlent toujours capables de progresser.

On rapporte qu’une mission de 120 kilomètres a été réalisée en une journée, avec 9 chiens attelés à un traîneau chargé de 300 kilos avec 3 hommes en armes et munitions.

Un attelage de 9 chiens aura transporté 22.530 kilos sur 1350 kilomètres. Pour remplir cette mission, 200 mulets auraient été nécessaires.

Des chiens d’Alaska dans le secteur du Bonhomme pendant la grande guerre, coll. E. Mansuy 

Des chiens d’Alaska dans le secteur du Bonhomme pendant la grande guerre, coll. E. Mansuy ; (Voir site l’Alsace.fr)

Des chiens d’Alaska dans le secteur du Bonhomme pendant la grande guerre, coll. E. Mansuy ; (Voir site l’Alsace.fr)

On le voit, les équipes de l’Alaska rendent de très gros services aux troupes de montagne.
Si l’on songe que les chiens ne prennent qu’un seul repas, revenant à 15 centimes, on comprend non seulement l’utilité mais encore plus l’avantage de ce moyen de traction qui, de plus, a mis dans le tragique de cette guerre une note de pittoresque.

Une carte “artisanale” envoyée par le soldat Abel Lamoureux à sa famille montre les attelages de chiens de traîneau qui étaient utilisés dans son régiment (18e régiment du train, 18e bataillon, 34e compagnie muletière) :

Attelage de chiens de traîneau au 18e régiment du train  

Attelage de chiens de traîneau au 18e régiment du train (site histoiredulab)

Attelage de chiens de traîneau au 18e régiment du train (site histoiredulab)

Deux exemples de missions accomplies :

En 4 jours : 90 tonnes de munitions à une batterie qu’hommes, mulets et chevaux avaient tenté de ravitailler pendant 15 jours, sans parvenir à apporter un seul obus.
En une nuit : 30 kilomètres de fils téléphoniques et rétablir ainsi la liaison avec un poste isolé par les Allemands. Des avions de reconnaissance avaient repéré le poste, mais n’avaient pu, jusque-là, lui être d’aucun secours. Grâce au téléphone de campagne ainsi posé et à des reconnaissances aériennes, le Q.G. fut capable de diriger les forces encerclées et de leur faire rejoindre les lignes françaises.

Chien « télégraphiste »

Equipé d’un harnais sur lequel est disposé une grosse bobine de fil, (qui se déroule au fur et à mesure de la progression de l’animal) notre brave chien, se voit offrir pour toute mission de rejoindre un poste avancé, franchissant les barbelés, les tranchées, afin de rétablir des communications coupées. (site infochiens.be)

Chien « télégraphiste »

Chien « télégraphiste » (site toutoublog.com)

Chien « télégraphiste » (site toutoublog.com)

Une VIDEO mise en ligne par l’ECPAD en 2012 montre sur le front des Vosges un traîneau tracté par des chiens d’Alaska qui apporte du ravitaillement à un cantonnement en 1917.

Pendant la période d’été

En été, les chiens ne demeurent pas inactifs. Les traîneaux pouvaient être munis de roues caoutchoutées et le ravitaillement continuait dans des conditions analogues. Ils traînent sur les rails de la voie des wagonnets qui peuvent contenir jusqu’à une tonne de matériel, transportant ainsi le double du chargement d’hiver.

Les chiens de traineau traînent sur les rails des wagonnets 

Les chiens de traineau traînent sur les rails des wagonnets (site pierreswesternfront.punt.nl, article route des crêtes)

Les chiens de traineau traînent sur les rails des wagonnets (site pierreswesternfront.punt.nl, article route des crêtes)

Ce n’est qu’avec l’arrivée des Américains dans les Vosges que les locomotives virent le jour, aux dépens de l’activité estivale des sections d’équipages canins de l’Alaska.

Les chiens de traineau au secours des blessés

En toute saison, ils ramènent des premières lignes à l’arrière les blessés : Deux grands blessés tiennent sur un de ces traîneaux allongés ; quatre blessés légers peuvent être assis. Aucun autre moyen de transport n’assure à ceux-ci, dans les mauvais chemins de la montagne, plus de confort.

Transport par les chiens de traineau sur les voies de 60 (Internet)

Transport par les chiens de traineau sur les voies de 60 (Internet)

Transport par les chiens de traineau sur les voies de 60 (Internet)

Tanet à la Schlucht attelage de chiens, avec au fond la route des crêtes – Crédits Pascal DURAND  

Tanet à la Schlucht attelage de chiens, avec au fond la route des crêtes – Crédits Pascal DURAND (site legrandshivarit)

Tanet à la Schlucht attelage de chiens, avec au fond la route des crêtes – Crédits Pascal DURAND (site legrandshivarit)

Le 18 juillet 1918 : une fin héroïque

Les chiens n’étaient pas censés être en contact direct avec les combats, mais près de la moitié des effectifs canins périrent sous le feu de l’ennemi.

« Les équipages canins furent souvent bombardés par canons, par avions. Ils essuyèrent également au cours de leurs transports le tir des mitrailleuses ennemies. Des conducteurs furent blessés, de nombreux chiens tués et du matériel détruit ou endommagé. » (site nordic.traineau)

L’effectif des S.E.C.A. (Section d’Equipages Canins d’Alaska) qui était de 436 chiens en 1915 était tombé à 247 chiens ; de ce fait, le Service des Chiens de Guerre avait mis à la disposition du Lieutenant Haas, un certain nombre de chiens français semblables à ceux utilisés dans les sections de chiens porteurs, en service dans diverses armées.
Une étude a été faite pour ramener 250 chiens d’Alaska supplémentaires en prévision de l’hiver 1918 afin d’augmenter l’effectif des S.E.C.A.. Or, l’armistice fut signé peu de temps après, alors le service des chiens de guerre décida la réunion des 2 sections d’équipages canins de l’Alaska en une seule.

« Plusieurs chiens furent décorés de la Croix de guerre et de nombreuses médailles militaires. Près de la moitié des effectifs canins a péri sous le feu de l’ennemi. Tous eurent droits aux honneurs de la presse française et américaine qui ne manquaient jamais de faire état de leurs exploits.

Voir photo d’un chien de traineau décoré sur le site poilusdalaska.com.

Un exemple de chien décoré en 14-18, Charlot :
Croix de guerre avec 2 étoiles. Cité à l’Ordre du Régiment  pour avoir sauvé plusieurs poilus ensevelis par une coulée de terre dans une tranchée…

Un exemple de chien décoré en 14-18, Charlot (site dupuyblogspotcom)

Un exemple de chien décoré en 14-18, Charlot (site dupuyblogspotcom)

A la fin de la guerre, les Chasseurs Alpins gardèrent leurs chiens avec lesquels ils s’étaient liés d’affection.

Les chasseurs alpins devinrent d’assez bons conducteurs de chiens qui fréquemment oubliaient la guerre, malgré la mitraille, tant leurs missions étaient sportives. Trois des chiens d’Alaska furent décorés de la Croix de Guerre. »

Cette aventure a été retracée en 2012 dans un documentaire, Nom de code : poilus d’Alaska,
réalisé par Marc Jampolski, écrit par Daniel Duhand, Marc Jampolski et Michael Pitiot
Coproduction : ARTE France, Bonne Pioche Télévision, Ideacom International, Radio Canada , ECPAD (France-Canada / 2011-90 mn)

Sources et sites à consulter pour en savoir plus sur les chiens de traineau :

Site chiensdetraineau.free  ; Site nordic.traineau.free.fr  ; site pierreswesternfront.punt.nl, article route des crêtes (nombreuses photos et documents) ; site poilusdalaska.com

site legrandshivarit ; site artois1418.skyrock.com ; Voir aussi site l-histoire-d-hier-a-demain ; site toutoublog.com ; site infochiens.be ; Des chiens d’Alaska dans le secteur du Bonhomme pendant la grande guerre (coll. E. Mansuy ; Voir site l’Alsace) ; Site pages14-18, page chiens de guerre  ; et page traineaux pendant guerre ; Site actualites.musee-armee.fr ; Instructions officielles relatives aux chiens dans les armées : site pages14-18

Site resistanceinventerre (présentation du film documentaire Un documentaire réalisé par Marc Jampolski, écrit par Daniel Duhand, Marc Jampolski et Michael Pitiot ; Coproduction : ARTE France, Bonne Pioche Télévision, Ideacom International, Radio Canada , ECPAD (France-Canada / 2011-90 mn

Site arte.tv

VIDEO  :

Front des Vosges (hiver) : cantonnement, 1917. Film muet de 13 minutes environ composé d’une succession de séquences dont voici la description :
– au foyer du soldat, des volontaires américains distribuent du café à des soldats français ;
– les hommes du 6e BCA (bataillon de chasseurs alpins) défilent lors d’une cérémonie organisée sur une route de montagne enneigée ;
– une patrouille de soldat s’engage sur un chemin enneigé. Les hommes avancent péniblement sur l’épais manteau neigeux, alourdis par leur paquetage ;
– des soldats participent au déblaiement d’une route de montagne, encombrée par la neige ;
– des soldats montent la garde dans une tranchée enneigée. Les hommes ont froid, certains se réchauffent en se tapant les bras. Le cantonnement de première ligne est pris sous la neige ;
– un soldat pose devant la caméra, portant un manteau de peau de bête et une barbe prise par le givre ;
un traîneau tracté par des chiens d’Alaska apporte du ravitaillement à un cantonnement.

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RADIO site franceculture.fr  Des animaux morts pour la France ! Histoire des bêtes de tranchées

achien-poilus-d-alaskaBibliographie
Daniel Duhand, La véritable histoire des poilus d’Alaska, Le livre qui raconte la Véritable Histoire des Poilus d’Alaska (140 pages), 19€50 port compris, En vente exclusivement sur ce site

BD Brune, Delbosco, Duhand, Les poilus d’Alaska, Melun printemps 1915, en vente depuis mai 2015 :

Daniel Légat et Anthony Pinto, Les Savoyards et la Guerre. Les combattants de 14-18, Editions 3dvision, page 99 ; livre CHePP disponible à la bibliothèque de Passy)

Guide  Michelin, Les champs de bataille, Alsace Moselle, p. 185 (livre CHePP disponible à la bibliothèque de Passy)

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Les débuts du ski dans l’armée française, 1896-1913
Des Passerands soldats skieurs en 14-18

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